Au départ, on a mis derrière le design éthique 3 dimensions : l’accessibilité, l’éco-conception et le design inclusif (qui relève principalement de l’UX writing). On a monté un pôle Design Ethique dont l’objectif est de partager nos veilles respectives, créer du contenu, créer des modules de formation. Mais finalement, pour moi, le design éthique va plus loin qu’une logique métier, c’est un état d’esprit. C’est poser des questions avant de foncer sur le projet : à qui ça sert ? Quels sont les objectifs ? Est-ce que le client veut seulement vendre plus ? Et au quotidien, ça veut dire simplifier plutôt que complexifier, et toujours garder l’humain au centre — pas juste l’utilisateur, mais toutes les personnes concernées, y compris les collaborateurs.
Franchement, oui. Mais ça demande de revoir ce qu’on met derrière “efficace”. Pour nous, ce n’est pas juste faire cliquer vite, c’est aider les gens à faire un choix éclairé, sans les piéger. On peut très bien concevoir des interfaces claires, engageantes, sans jouer sur la peur ou la confusion. Et souvent, c’est là que la confiance se construit.
On creuse. La plupart du temps, ce n’est pas un refus de l’éthique, c’est juste que ce n’est pas encore formulé. On essaie de poser les bonnes questions, d’ouvrir d’autres perspectives. Toutes les entreprises n’en sont pas encore au même degré de sensibilité sur ces questions, ou n’ont tout simplement pas les mêmes enjeux. La démarche éthique est très présente dans certains secteurs d’activité : public, milieu associatif et culturel. Souvent, la logique éthique va de soi dans ces secteurs. Sur d’autres secteurs, cela dépend de la politique RSE ou tout simplement de la sensibilité du décisionnaire.
Mais dans tous les cas, on a compris que le design éthique est au service du business dans de très nombreuses situations : par exemple, l’accessibilité sert la hiérarchisation des infos qui sert la navigation, l’éco-conception sert la réactivité de la navigation qui sert la durée des sessions , le design inclusif sert la rétention qui sert la conversion. Finalement, nous n’avons jamais été confronté à des situations ou le design éthique est un frein à la logique business. Et si on sent qu’il y a zéro marge de manœuvre, on adapte notre implication. Mais on ne claque pas la porte : on préfère rester en dialogue, c’est souvent là que les choses bougent. Le design éthique, ce n’est pas binaire, il y a des degrés, il suffit de placer le curseur au bon endroit.
C’est justement ce qui nous permet de rester dans le dialogue, même quand les objectifs du client nous bousculent. L’humilité, c’est accepter qu’on n’a pas toutes les réponses, qu’on avance ensemble, en questionnant. C’est une façon de rester à l’écoute, de s’adapter sans se renier, et surtout de ne jamais perdre de vue pour qui et pourquoi on conçoit.
On défend l’idée qu’on peut faire du design à impact, utile, beau et responsable — sans renoncer à nos convictions. Un peu comme un jardinier qui cultive sans pesticides : le résultat est plus sain, plus durable, et ça fait du bien à tout l’écosystème.